ATHLE.ch VINTAGE | BIOGRAPHIE PIERRE DÉLÈZE / EPISODE 9 | Au milieu des années '70, un jeune et prometteur coureur de demi-fond nommé Pierre Délèze intègre les cadres nationaux dirigés par Jean-François Pahud. C'est le début d'une fantastique histoire qui va conduire le Valaisan jusqu'au top niveau du demi-fond mondial. ATHLE.ch VINTAGE propose de revivre la carrière exceptionnelle du plus magnifique miler de l'Histoire de l'athlétisme suisse. Le neuvième des dix-huit épisodes de cette biographie est consacré à la préparation olympique de Pierre Délèze lors de la première partie de la saison 1984.

La grande préparation pour les Jeux Olympiques de Los Angeles débute pour Pierre Délèze en novembre 1983. Au sortir d’une pause bien méritée, il est d’attaque pour mettre à bien tout ce qui doit l’être. Cette quête olympique, beaucoup d’athlètes l’ont dans la tête. En Suisse, ils sont une bonne quinzaine à vouloir obtenir l’accès à cet Eldorado athlétique. De Pierre Délèze à Markus Ryffel, en passant par Peter Wirz, mais aussi Roland Dalhäuser, Werner Günthör ou Cornelia Bürki, tous ont de grandes idées à vouloir concrétiser en Californie. Les courses sur route de l’automne 1983 rendent à chaque fois le verdict prévu avec trois victoires, le 19 novembre lors de la Basler Stadtlauf à Bâle, le 17 décembre lors de la Course de Noël à Sion et le 31 décembre lors de la Silvesterlauf à Zurich. L’hiver et le printemps sont à nouveau consacrés à l’entraînement, mais en parallèle, Pierre termine également ses études à l’université de Fribourg. C’est donc un athlète désormais professionnel qui débarque le 31 mai 1984 à Küsnacht pour effectuer sa rentrée avec un 800 m. Sur le petit stade zurichois, Pierre réussit une bonne course en 1’49″79. Trois jours plus tard, il se rend à Saragosse (Espagne) pour y disputer un 1000 m qu’il boucle en 2’21″22. Pierre manque encore un peu de rythme, c’est certain. Pour cela il compte sur la Westathletic Cup pour passer un cap. Pourtant cette compétition, qui doit avoir lieu à Lisbonne les 16 et 17 juin, Pierre ne la verra pas car il n’a tout simplement pas été sélectionné ! Cette sombre histoire est relatée par le journaliste Yves Jeannotat : « La non-sélection de Pierre Délèze fait des bulles, c’est le moins que l’on puisse dire. Dirigée avec doigté et compétence par Georges Kennel (président) et Hansjörg Wirz (directeur technique), la Fédération Suisse d’Athlétisme n’avait plus connu de dépression depuis bien des années, mais, dans le cas particulier, elle a commis une erreur (Wirz le reconnaît) qui, en raison surtout d’un manque d’information concrète et précise, a pris les proportions d’un véritable tourbillon. Quelle erreur a-t-elle commise ? Celle de ne pas avoir pensé à réunir autour d’une table ronde, un ou deux jours avant la date de sélection, deux entraîneurs nationaux et trois athlètes : Jean-François Pahud, dont dépend Pierre Délèze; Kaspar Egger, responsable de Peter Wirz et de Christophe Ulmer. En fait, c’est ce dernier qui, bien involontairement d’ailleurs, est à l’origine de toute l’histoire : comme on lui donnait une toute petite chance de réussir, à Lisbonne, les 1’46″00 sur 800 mètres exigés pour les Jeux Olympiques, il était indispensable de le sélectionner. En conséquence, ou Wirz, ou Délèze devait rester sur le carreau. Logiquement, sachant qu’il a couru deux jours avant Lisbonne un 1500 mètres à Florence, où il y a d’ailleurs obtenu la limite avec 3’36″63, c’est Wirz qui aurait dû céder sa place. S’il l’avait voulu, voyant venir le conflit, l’entraîneur Kaspar Egger aurait certainement pu atteindre l’entraîneur de Délèze pour en discuter. Pahud est affirmatif sur ce point. Pierre Délèze, qui ne s’est jamais préparé aussi sérieusement que cette année, a subi, en l’occurrence, tout comme son entraîneur, un affront que ni l’un ni l’autre ne méritaient. C’est l’athlétisme qui en souffre finalement. Mais qu’on se rassure, Pierre continuera à porter le maillot national, contrairement à ce qui a été annoncé ! Délèze est un grand champion et il n’a pas besoin du chantage pour imposer sa classe ! ». Pierre et son entraîneur se seraient passés de ces querelles; mais comme il a été dit, la saison doit continuer car l’important, à part la rose, ce sont les Jeux Olympiques. On arrive déjà au mois de juillet, où trois courses sont prévues en six jours. Le 2 juillet, Pierre se rend à Stockholm pour le meeting Dagens Nyheter Galan. Il peut voir là-bas la fantastique course du Portugais Fernando Mamede qui bat en 27’13″81 le record du monde du 10000 m d’Henry Rono de près de neuf secondes ! La course du 1500 m est aussi un bon moment du meeting. Pierre Délèze a fort bien mené sa course en prenant d’entrée le sillage de Steve Ovett, qui ne le distance que dans le dernier tour. Il parvient cependant à résister au retour des autres concurrents pour conserver la deuxième place, à trente-huit centièmes d’Ovett. Avec ses 3’36″03, le Valaisan a dépassé de plus d’une seconde le temps qui lui était demandé pour pouvoir se rendre aux Jeux Olympiques. Comme l’an dernier, le souci des minimas a été balayé d’entrée, ce qui est évidemment une très bonne chose. Deux jours plus tard, le 4 juillet, Pierre court un nouveau 1500 m à Helsinki. Outre le fait de se rappeler de très bons souvenirs, il se forge un moral d’acier et gagnant de brillante manière cette course en 3’36″31. Il devance le Finlandais Antti Loikkanen, à qui il a mis une seconde et trente-deux centièmes dans la vue. Après cette mini-tournée Scandinave, Pierre s’envole pour Barcelone où dispute le 8 juillet un mile qui lui permet de confirmer sa bonne forme. Il s’impose en 3’57″79 devant l’Espagnol José Manuel Abascal, auquel il n’a laissé aucune chance dans la dernière ligne droite.
Le retour à Saint-Moritz permet à Pierre Délèze de souffler un peu et de retrouver ses habitudes. Tout est fait pour que Pierre arrive en forme aux Jeux Olympiques. Jean-François Pahud veille à ce que tout soit parfait, alors que Bruno Lafranchi joue parfaitement son rôle de sparring-partner, tout en préparant le marathon olympique.

En parallèle à son affûtage pour les Jeux Olympiques de Los Angeles, Pierre Délèze s’adonne le 20 juillet 1984 à une émission appelée « Plans- fixes ». Dans un entretien en noir / blanc sans reprises ni coupures avec le journaliste Jean Mayerat (qui n’y connaît absolument rien à l’athlétisme), il évoque ses débuts, sa carrière avec ses hauts et ses bas, et finalement ses objectifs pour les Jeux Olympiques, le tout avec une sincérité débordante. Un grand bravo à Pierre qui s’en sort haut la main, dans un exercice de funambulisme linguistique fort peu évident à gérer. Il est temps d’aborder les Jeux Olympiques de Los Angeles. La confiance est de mise, mais Pierre Délèze sait que le chemin en direction du podium va être ardu. Les championnats du monde à Helsinki avaient présenté un plateau d’athlètes d’une densité incroyable, mais les Jeux Olympiques 1984 vont aller plus loin encore dans l’adversité. Les trois Anglais Steve Cram, Sebastian Coe et Steve Ovett, les trois Américains dont Steve Scott, l’Espagnol José Manuel Abascal ou encore les Africains Joseph Chesire ou Omar Khalifa, tous aspirent à une médaille olympique. Ça fait évidemment beaucoup de monde pour trois places seulement. Mais Pierre a acquis une telle plénitude physique et psychologique, que rien ne permet de penser que ces Jeux Olympiques de Los Angeles vont mal se passer. Bien sûr le spectre de Moscou 1980 est toujours présent dans sa tête. Mais cet événement a aussi servi de détonateur pour construire le chemin qui l’a fait arriver maintenant au plus haut niveau de la hiérarchie mondiale du 1500 m.
Le dernier test en compétition se déroule le 27 juillet à Langenthal où il affronte sur 2000 m deux autres coureurs qualifiés pour les Jeux Olympiques : Peter Wirz et Markus Ryffel, tous deux du ST Bern. La course est rondement menée et elle voit le trio rester compact. C’est finalement le Valaisan qui gagne en 4’57″27. Il devance d’une seconde Wirz, qui sera l’un de ses adversaires à L.A., et de plus de deux secondes Ryffel. On le voit, les trois chercheurs d’or sont prêts pour la Californie et ses Jeux Olympiques pour le moins prometteurs.

PAB

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Pierre Délèze

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