Les Jeux Olympiques sont désormais terminés; tous les athlètes et leurs dirigeants ont investi les différentes gares parisiennes afin de rentrer au bercail. Tous ? Non ! Un seul athlète, suisse qui plus est, a dû rester dans la capitale française : il s’agit de Paul Martin ! En effet, le vice-champion olympique du 800 m a en tête d’effectuer pendant un petit mois une tournée de meetings à travers l’Europe. Ainsi de France, son périple l’amènera en Belgique, en Suède et en Allemagne, avec un programme pour le moins chargé : 13 courses en 24 jours, dont une par jour durant toute la semaine du début du mois d’août; téméraire le garçon ! Tout commence le lundi 14 juillet, à l’occasion d’une exhibition à Colombes dans le cadre des festivités célébrant les 135 ans de la Révolution Française. Le Lausannois remporte d’abord un 400 m qu’il déroule en 51″2, puis il se met à la poursuite d’adversaires lors d’un 1500 m par handicap. Il rattrape presque tout le monde, mais il doit laisser deux coureurs franchir la ligne avant lui. Son chrono du jour de 4’03″4 représente à ce moment-là son record personnel, battu d’une seconde et un dixième. Pour conclure cette journée d’exhibition, il s’adjuge encore la course du 2000 m steeple en 6’21″8. Paul Martin a ensuite le temps d’effectuer quelques flâneries dans le Paris flamboyant des Années folles avant de voyager en direction de la Belgique.
Deux courses en Belgique
Le 19 juillet à Bruxelles, Paul termine troisième d’un 400 m, puis il remporte le 800 m en 1’58″0. Deux jours plus tard, il se trouve à Gand pour courir un 1000 m. Officiellement, le record suisse de cette distance peu usuelle est de 2’48″0 par Jules Gaillepand (CHP Genève). À Gand, le Lausannois court nettement plus vite avec un remarquable 2’33″4, une performance que le département technique de l’A.S.F.A. ne validera pourtant jamais comme étant un record suisse ! Dans son train qui l’emmène maintenant pour la Suède, Paulet n’en a cure de cette futilité. En revanche on peut aisément imaginer qu’il ressasse, avec autant de satisfaction que de regrets, sa finale olympique du 800 m d’il y a deux semaines…
Cinq courses en cinq jours en Suède
Arrivé à Stockholm, la ville de la Ve Olympiade, le Suisse tente de trouver ses marques dans un pays dont il ne connaît ni la langue ni les coutumes. Pourtant, il parvint à fort bien s’adapter et surtout il se sent prêt à affronter son programme lors de cette semaine de folie qui s’ouvre devant lui. Le vendredi 1er août lance son feu d’artifice avec un nouveau record personnel sur 1500 m bouclé seul devant en 4’01″1. Le lendemain sur 800 m, bien qu’il soit crédité du temps correct de 1’56″2, il est battu par deux Suédois ! Au troisième jour de compétition dans la capitale suédoise, il prend part à un 1000 m qu’il gagne en 2’31″6, soit près une seconde et huit dixièmes de mieux qu’à Gand (et toujours pas de record suisse homologué !). Sans plus attendre, Paul quitte la capitale et les bords de la mer Baltique pour se rendre à Göteborg, situé sur les bords de la mer du Nord. Les 470 km qui séparent les deux côtes lui font voir du pays, via Norrköping, Linköping et Jönköping. Le 4 août, en fin de journée, il se retrouve sur la ligne de départ pour un nouveau 1000 m et s’impose en souplesse en 2’34″2. Le 5 août, il s’assied à nouveau sur la banquette en bois d’un train qui doit maintenant le mener le long de la côte en direction de Malmö, situé 280 km plus au sud. Dans la ville vis-à-vis de Copenhague, Paul Martin court son quatrième 1000 m en quinze jours, cette fois-ci en 2’35″2.
La tournée se termine à Berlin
Son ultime compétition doit se disputer le 6 août à Berlin, où un 800 m est à son programme. Le Lausannois doit encore une fois prendre un train qui doit avaler près de 600 km. Heureusement les paysages, tous aussi fascinants les uns que les autres, lui permettent de ne pas voir le temps passer. Berlin, une ville accablée les lourdes réparations que l’Allemagne doit assumer à la suite du traité de Versailles, débute à ce moment-là une période de prospérité en devenant progressivement la plus grande ville industrielle d’Europe. À l’instar de Paris, les Années folles gagnent également Berlin; cette période faste est appelée en allemand « die Goldene Zwanziger ». Paul Martin commence à comprendre pour-quoi son ami de l’équipe nationale, le marcheur Arthur Tell Schwab, est si attaché à cette ville qui se prétend être l’équivalent de Paris. Ultime course de sa tournée européenne (athlétique et culturelle), ce 800 m de Berlin ne lui sourit pas puisqu’il doit s’incliner en 1’56″2 face à un coureur allemand. La fatigue de son dernier long voyage explique certainement cette défaite, bien qu’elle ne soit pas si grave que ça. Sa tournée touchant ainsi à sa fin, Paul Martin possède encore quelques jours pour visiter Berlin, tout en récupérant de tous ses efforts consentis depuis un mois. L’étape suivante de son pensum passera par Bâle les 9 et 10 août prochains pour les championnats suisses simples.
PAB
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