Le stade du Letzigrund accueille les 1 et 2 août les sélections helvétiques et yougoslaves pour un match à deux athlètes. Dans l’histoire, au cours des cinq matches précédents, la Yougoslavie n’avait encore jamais été battue par nos représentants. Voilà pourquoi ce match est un sérieux test pour l’athlétisme suisse, qu’on sait en grande forme. Sur 100 m on retrouve un Philippe Clerc tout de même très fatigué de ses efforts de Stuttgart. Il remporte cependant le 100 m avec un très bon 10″4; cela s’est pourtant fait au centimètre, dans les dernières foulées. Le mauvais temps est l’un des éléments marquants de la deuxième journée. Dans ces conditions, Clerc ne force pas son talent pour s’imposer en 20″9 devant Hansruedi Wiedmer qui est crédité de 21″1; en fait, il a songé uniquement à surveiller sa décontraction et sa technique. Le classement final de ce match débouche sur l’agréable surprise de voir la Suisse l’emporter facilement avec 111 points à 98. Ainsi après l’Eire à Dublin, l’Espagne, la Belgique, la Hollande, l’Autriche et le Danemark à Madrid dans le cadre du Westathletic, l’équipe suisse d’athlétisme épingle un nouveau nom à son tableau de chasse 1969, celui de la Yougoslavie. En 1967 à Celle, la Suisse avait été battue de dix-neuf points. Deux ans plus tard, la différence entre ces deux rencontres est donc de trente-deux points. C’est énorme et, au-delà du simple avantage des terrains, cela correspond assez bien aux progrès réalisés par notre athlétisme depuis deux ans.
Le 9 août à Yverdon, Philippe Clerc est la grande attraction du Challenge Davo. Il court sans forcer un 400 m en 48″3. En période de récupération, le recordman d’Europe du 200 m a tout de même choisi de maintenir un certain tempo à cinq semaines des championnats d’Europe.
Les 23 et 24 août, les organisateurs des 62èmes championnats suisses individuels enregistrent les inscriptions de 290 athlètes, dont 75 femmes (chiffre record). Sur 100 m, les sprinters du Stade Lausanne font très fort en remportant les trois médailles. Comme à son habitude, Dave James jaillit de ses blocs au coup de pistolet et mène nettement aux 50 mètres. Cependant Clerc fait étalage de sa classe et gagne à sa manière, c’est-à-dire dans les trente derniers mètres. Il prend un avantage que le chronomètre exprime parfaitement : 10″4 pour Clerc, 10″6 pour James et 10″7 pour Wiedmer. Dimanche pour la seconde journée, il n’a plu qu’une fois à Saint-Gall. La pluie, passe encore; mais le froid a semblé tétaniser les athlètes. Dans ces conditions, on ne peut pas blâmer Philippe Clerc de renoncer au 200 m, car ce n’est pas la peine de risquer un claquage à ce moment de la saison. Une semaine plus tard, le dimanche 31 août, Philippe Clerc se trouve à Varsovie pour peaufiner sa préparation face à des adversaires de prestige. Sur le tartan du stade Skra, le sprinter du Stade Lausanne prend la troisième place du 100 m en 10″4, soit le même chrono que l’Américain Ben Vaughn et le Polonais Zenon Nowosz. Dans le 200 m, comme à Stuttgart il y a pile un mois, il n’est devancé que par Vaughn et court en 21″0.
Le 6 septembre, le nouveau stade de Vidy à Lausanne accueille les meilleurs juniors et cadets du pays pour les championnats suisses d’athlétisme. Avant que ne débute la compétition, le Stade Lausanne met sur pied une petite manifestation marquant symboliquement le passage de l’ancien stade aux nouveaux terrains appelés « Vidy-Ouest ». Quelques anciennes gloires se joignent à celles d’aujourd’hui pour faire un tour de piste au milieu d’un essaim d’écoliers du club. Le Dr Paul Martin, vice-champion olympique du 800 m en 1924 à Paris, prend ensuite la parole pour dire sa joie de voir ces magnifiques installations mises en service par la fleur de notre jeunesse, ces jeunes gens forts de corps et de caractère, et qui sont appelés à former un des piliers de la société de demain. Il a aussi un mot de gratitude envers la Municipalité de Lausanne, qui a déployé un zèle particulier pour que la piste soit au point pour le jour de ces championnats nationaux juniors. Voilà un très beau discours, cependant on ne peut s’empêcher de remarquer que malgré le fait qu’un nouveau stade ait été construit à Vidy, il est étonnant de constater que le revêtement soit à nouveau en cendrée, alors que partout en Europe, depuis Zurich en juin 1968, c’est un revêtement en tartan qui est posé. À la traîne dans ce domaine, l’athlétisme lausannois va devoir attendre le mois de juillet 1977 pour bénéficier, sur ces mêmes installations, de ce fameux tartan et même le mois d’août 1986 pour voir le stade Olympique de la Pontaise enfin doté d’un revêtement en synthétique. La cendrée de ce nouveau stade de Vidy est trop fraîche et donc beaucoup trop friable pour offrir aux participants des conditions idéales. Hors concours, Philippe Clerc effectue un petit test sur 100 m, avec l’aide de quatre autres athlètes de son club. Le résultat n’est pas des plus concluants avec 10″8 au chronométrage électrique (donc 10″6 manuel) pour le recordman d’Europe du 200 m. Il ne faut cependant pas attacher trop d’importance à ce résultat car Clerc n’est que rarement bon dans une course de ce genre, sans motivation et sans concurrence.
Les championnats d’Europe à Athènes
Les 9èmes championnats d’Europe d’athlétisme se déroulent du 16 au 21 septembre 1969 à Athènes, au stade Karaïskaki. Plus de six cent septante participants venant de trente nations sont en compétition dans les trente-huit épreuves qui figurent au programme. La politique s’est mêlée au sport car ces championnats d’Europe ont servi la propagande de la dictature des colonels Grecs qui, pour redorer leur blason, les utilisent principalement avec le film documentaire « Jeux européens ». D’autre part, l’affaire Jürgen May marque au fer rouge ces championnats d’Europe d’athlétisme. Ce coureur de demi-fond qui avait commencé sa carrière en Allemagne de l’Est, avait décidé de franchir le Rideau de Fer en 1967 pour s’installer en Allemagne de l’Ouest. Les instances dirigeantes refusent pourtant qu’il dispute le 1500 m sous le maillot ouest-allemand. Par solidarité, les athlètes de la RFA décident de boycotter ces championnats !
Place au sport avec une première journée, le mardi 16 septembre, où presque tous les Suisses ont été à leur affaire. En effet, sur six athlètes engagés sur le front de cette journée initiale, un seul est éliminé : Hansruedi Wiedmer, qui après avoir brillamment franchi le cap des séries du 100 m en se classant deuxième en 10″8 derrière le co-recordman d’Europe Valeriy Borzov, échoue aux portes de la grande finale, en prenant la sixième place de sa demi-finale en 10″7. Philippe Clerc a quant à lui produit une très forte impression, tant en séries qu’en demi-finales de ce 100 m, au point qu’on doit logiquement en faire l’un des tous grands favoris de la finale du lendemain. Lors des éliminatoires, c’est sans la moindre difficulté que Clerc gagne sa série en 10″7, avec 4,5 m/s de vent défavorable, devant le Polonais Nowosz, le Français Fenouil et le Soviétique Aleksandr Lebedev. Dans la demi-finale, on est tenté de dire que c’est avec une facilité dérisoire que Clerc gagne en 10″5 devant le Soviétique Borzov, le Français Merz et l’Allemand de l’Est Haase. À mi-course, il se permet de regarder très calmement sur sa droite, puis sur sa gauche, pour savoir exactement où il en est. Après cette demi-finale, le Lausannois est aussitôt parti préparer sa finale du 100 m, dans le calme, au bord de la mer.
Ce mercredi 17 septembre doit consacrer l’homme le plus rapide d’Europe. Deux heures et demie avant cette course, Philippe Clerc arrive sur le stade d’entraînement et semble plus tendu que la veille, quand il avait éprouvé de la facilité dans les séries et les demi-finales. Il doit même avouer qu’il n’a pas très bien dormi la nuit passée. Il est maintenant dix-sept heures et le vent souffle toujours de manière assez soutenue et contraire à la course. Les huit sprinters sont maintenant en position « prêt » dans leurs starting-blocks. Le Français Alain Sarteur prend un départ absolument prodigieux, ce qui lui permet de rester en tête jusque dans les derniers mètres. Pendant que l’inattendu Français caracole en tête, Philippe Clerc éprouve de la difficulté à se mettre en action. Il se doit de produire un sérieux effort dans son couloir 1 pour tenter de revenir. Dans les derniers mètres, le Soviétique Valeriy Borzov se fait l’auteur d’un étonnant retour, passe sur le fil le Français et devient champion d’Europe en 10″49, face à 2,7 m/s de vent contraire. Alain Sarteur, qui se voyait longtemps vainqueur, prend la deuxième place en 10″50 et Philippe Clerc, finalement bien revenu, s’empare de la médaille de bronze en 10″56.
Après la course, Philippe Clerc est assez déçu, même en colère. En effet, il vient de perdre le pari qu’il avait engagé il y a quelques semaines avec lui-même et qui consistait à gagner la plus difficile médaille d’or qui s’offrait à sa convoitise. On peut comprendre sa réaction car on sait que Philippe Clerc est un éternel insatisfait et qu’il est d’une exigence folle envers lui-même. C’est aussi peut-être parce qu’il n’a pas été retenu pour les Jeux Olympiques de Mexico qu’il est monté sur le podium. C’est peut-être parce qu’il n’a pas vaincu sur 100 m qu’il pourra dans quelques jours triompher sur 200 m. L’ambition, chez Clerc, est à la hauteur de son talent. Elle est même dévorante. En revanche pour le public, cette médaille de bronze constitue l’un des plus beaux fleurons de l’histoire de l’athlétisme suisse. Il y a sept ans à Belgrade, c’était dans une explosion de joie que l’on avait accueilli la médaille de bronze de nos relayeurs du 4 x 400 m. Aujourd’hui à Athènes, il faut prendre cette nouvelle médaille de bronze comme un événement positif pour le sport de notre pays, même si l’espoir d’une victoire s’est transformé dans la réalité en une médaille de bronze.
Philippe Clerc remporte le titre européen du 200 m qui lui était promis
Guy Lagorce, l’ancien sprinter de l’équipe de France au début des années soixante, l’avait prédit : «Dans le sprint européen, il y a Clerc et puis tous les autres». Le 100 m d’Athènes avait certes administré trois jours plus tôt un gros démenti, mais le 200 m de ce 20 septembre donne finalement raison tous ceux qui avaient élu Philippe Clerc comme le favori du demi-tour de piste. En effet, Clerc ne s’est pas contenté d’assurer sa victoire. Malgré un virage assez prudent, il se détache irrésistiblement dans la ligne droite. On assiste alors à un cavalier seul du Lausannois dans cette finale du 200 m et, sans avoir puisé au fond de ses réserves, il l’emporte très facilement en 20″6 au chronométrage électrique (ce qui correspond à un 20″5 manuel). Cette victoire, aux allures d’un triomphe, personne n’était vraiment en mesure de la lui contester, c’est certain. L’Allemand de l’Est Hermann Burde, deuxième en 20″9 et le Polonais Zenon Nowosz, troisième en 20″9 également, sont suffisamment loin pour s’en convaincre.
Après les désillusions de l’an dernier avec sa non-sélection pour les Jeux Olympiques de Mexico, Philippe Clerc a su remettre l’ouvrage sur le métier en se préparant selon ses propres convictions. L’hiver 1968-1969 fut d’abord comme un rêve : avec une méthode qu’aucun sprinter n’avait osé expérimenter auparavant, faite de longs footings. Ce fut ensuite un comme un espoir : après le Disque d’Or à Lausanne qui avait ouvert la saison et au cours duquel il avait battu Hansruedi Wiedmer par deux fois en réalisant 10″3 sur 100 m et 21″2 sur 200 m. Puis comme une obsession : au lendemain de son record d’Europe du 200 m, les 20″3 battus le 4 juillet à Zurich et qui le désigne comme la cible de tout ce qui court vite en Europe. Aujourd’hui, c’est LA réalité : Philippe Clerc est champion d’Europe du 200 m et non sans panache. Demain, ce sera une référence. Voilà, simplifiées, les principales étapes de l’extraordinaire saison de Philippe Clerc. Mais, derrière cette sécheresse des mots, combien d’hésitations, de doutes, d’excès de confiance aussi ? Une infinité. L’athlète, et à plus forte raison un sprinter aux nerfs constamment sous tension, est un être qui vit à 200 à l’heure, même si ses deux jambes ne l’emmènent finalement qu’au seuil des 37 km/h, au prix d’un effort et d’une maîtrise de soi totalement ahurissants. À une heure choisie par d’autres, il doit être prêt. Prêt à contrôler tous ses gestes pendant plus de vingt secondes. Philippe Clerc est capable d’être en grande condition aux rendez-vous qu’il se fixe. Cette année, il s’en était donné trois : Zurich, Stuttgart et Athènes. Il a réussi sans la moindre bavure, tant à Zurich qu’à Athènes, mais un peu moins à Stuttgart, où il était cependant le premier des Européens en 20″7. Au cours de la traditionnelle séance d’interviews des médaillés, Philippe Clerc déclare : «Mon palmarès européen est maintenant complet, titre et record du 200 m, si bien que je n’ai plus rien à glaner. Maintenant, il me sera difficile de conjuguer la poursuite de mes études de médecine et un entraînement dans la perspective des Jeux Olympiques de 1972 à Munich. À moins que la Fédération Suisse d’Athlétisme ne m’aide vraiment à fond». Clerc parle de renoncer, mais peu de gens veulent y croient. Pourtant la réalité qui l’attend dans huit jours déjà avec son troisième propédeutique de médecine va lui prendre tout son temps. Il devra penser à l’athlétisme et aux immenses horizons qui lui sont désormais ouverts… un peu plus tard ! Philippe Clerc sous les feux de la rampe, c’est bien normal. Mais il ne faut pas oublier également la fort belle prestation de Hansruedi Wiedmer, qui termine au sixième rang de cette finale en 21″1. Le Bâlois du Stade Lausanne a fait bien mieux que ce qu’on pouvait attendre de lui et, sans forcément copier les méthodes particulières de Philippe Clerc, il pourrait les adapter pour trouver les meilleures forces en vue de ses sorties futures sur 400 m, où son potentiel est pour lui très intéressant.
L’équipe suisse d’athlétisme, déjà victorieuse sur plusieurs fronts durant cette saison, sort grandie de ces championnats d’Europe à Athènes. Alors que dans toute l’histoire de ces compétitions continentales, qui virent le jour en 1934, notre pays n’avait eu droit qu’à une seule médaille (l’or pour Fritz Schwab sur 10 km marche en 1950 à Bruxelles), voilà qu’elle va quitter Athènes avec trois médailles dans ses valises, une d’argent dans celle de Meta Antenen et deux, d’or et de bronze, dans celle de Philippe Clerc. En vérité, ce bilan est encore plus impressionnant. Il suffit de se pencher sur la suite des différents classements pour s’en persuader. On trouve ainsi Hansjörg Wirz en quatrième position du 400 m haies, Hansueli Mumenthaler en cinquième place du 800 m, Hansruedi Widmer au sixième rang du 200 m et Elisabeth Waldburger, sixième également du pentathlon. C’est tout simplement extraordinaire. Au classement par nation, l’Allemagne de l’Est remporte la mise avec 25 médailles (11-7-7), devant l’Union Soviétique avec 23 podiums (9-7-7) et la Grande-Bretagne avec 17 médaillés (6-4-7). La France termine quatrième, mais loin avec seulement 7 podiums, puis suivent la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Hongrie et la Suisse qui termine huitième devant notamment l’Italie et l’Autriche.
Le 27 septembre à Lausanne, sur les installations de l’ancien stade de Vidy et par des conditions idéales, la dernière édition du Disque d’Or permet de rendre un hommage à l’athlète du Stade Lausanne, Philippe Clerc. Le champion et recordman d’Europe du 200 m fait honneur à sa réputation en remportant un 100 m de haut niveau face à Dave James et à Hansruedi Wiedmer. C’est pourtant un James des tous grands jours qui jaillit le mieux de ses starting-blocks, ce qui lui vaut immédiatement près de deux mètres d’avance. Clerc doit alors s’employer à fond pour les combler et ce n’est que dans les derniers mètres que, en changeant brusquement de rythme, il parvient à s’imposer en 10″3, reléguant James à un dixième et Wiedmer à deux dixièmes.
Philippe Clerc, sportif suisse de l’année 1969
L’Association suisse des journalistes sportifs a procédé, pour la vingtième fois, à l’attribution de ses distinctions annuelles pour les mérites sportifs du pays. Ces distinctions sont désormais au nombre de cinq. L’athlétisme est à l’honneur puisque le mérite sportif individuel est revenu au sprinter lausannois Philippe Clerc, champion d’Europe du 200 m. Par team, l’équipe nationale d’athlétisme a décroché la deuxième place, alors que le prix de la sportivité a été décerné au sprinter argovien Ruedi Oegerli. Les mérites individuels et par équipes ont été attribués par vote. La liste soumise aux membres de l’Association suisse des journalistes sportifs comprenait une série de noms, mais les votants avaient la possibilité de désigner des candidats de leur choix. À noter que conformément au règlement, les trois précédents lauréats (Meta Antenen, Werner Duttweiler et Josef Haas) n’étaient pas rééligibles. Le nombre des votants, qui avait déjà augmenté de dix pour cent l’an dernier, a fait un nouveau bond en avant. De 396 en 1968, il a passé à 443 en 1969, ce qui constitue un nouveau chiffre record. Habituellement, les votes sont souvent différents suivant la région de Suisse d’où ils proviennent. Il n’en a rien été cette fois-ci : les lauréats ont fait l’unanimité, ce qui est d’ailleurs confirmé par la netteté de leur succès. Au mérite individuel, le total de points établi par Josef Haas l’an dernier (2’457 points) a été nettement amélioré par Philippe Clerc, qui a approché les 4’000 points. Le Lausannois a d’autre part été placé exactement à trois cents reprises à la première place, ce qui ne s’était jamais vu. Deuxième, Xaver Kurmann n’a été placé que trente-sept fois à la première place, contre trente-et-une fois à Joseph Siffert et vingt-cinq fois à Ely Tacchella.
La saison d’athlétisme 1969 d’exception de Philippe Clerc a été également couronnée par la réussite de son troisième propédeutique à l’Université de Lausanne, ce qui en fait bien le sportif le plus méritant de l’année. Ce poids plume de l’athlétisme (1,75 m pour 58 kg) pratique la course à pied depuis 1961, mais ce n’est qu’en 1963, à l’âge de seize ans, qu’il commence à s’épanouir. Il obtient son premier titre national, celui du 200 m, en 1966, ce qui lui vaut d’être retenu dans le 4 x 100 m pour les championnats d’Europe de Budapest. Il n’a depuis ajouté que deux autres titres nationaux à sa collection : le 100 m en 1968 et en 1969. Côté performances, il égale en 1967 le record suisse du 100 m en 10″3, puis celui du 200 m, détenu par Peter Laeng, en 20″7. Sa saison 1968 est en revanche un échec complet et on a même pu craindre un moment qu’il ne réussisse pas à surmonter sa déception. Mais il n’en est rien car au cours de cette saison 1969, il réussit tout ce que la malchance l’avait empêché de faire en 1968. Le 8 juin à Zurich, il parvient enfin à battre le record suisse du 200 m en 20″6. Le 4 juillet, lors du meeting international de Zurich, il égale le record suisse du 100 m en 10″2 avant de battre le record d’Europe du 200 m en 20″3, troisième performance mondiale de l’année derrière les 20″0 de John Carlos et les 20″2 de Lennox Miller. Le 31 juillet à Stuttgart, il est sélectionné dans l’équipe d’Europe qui rencontre les États-Unis. Bien que battu par les deux Américains John Carlos et Ben Vaughn, il devance en 20″7 l’Allemand Jochen Eigenherr, l’ancien recordman d’Europe. Aux championnats d’Europe à Athènes, il ne déçoit pas en remportant non seulement le titre du 200 m, mais également la médaille de bronze du 100 m.
Quelques jours plus tard, un jury international dirigé par Adrian Paulen (le Président du comité d’Europe au sein de la Fédération Internationale) a désigné la Française Nicole Duclos et le Bulgare Michail Shelev comme meilleurs athlètes européens de l’année. Ces deux lauréats se verront remettre à Ostrava un soulier d’or. Dans le classement masculin, Philippe Clerc figure au troisième rang; pour flatteuse qu’elle soit, elle n’en est pas moins entièrement méritée. Philippe Clerc a dominé assez nettement le sprint européen. Il a certes concédé quelques défaites, mais dans des courses relativement peu importantes. En revanche, là où l’enjeu était de taille, il n’a jamais déçu. En battant Edwin Roberts à Zurich et en faisant pratiquement jeu égal avec John Carlos dans le virage du 200 m du match Europe vs États-Unis, il a prouvé qu’il était un sprinter de valeur mondiale. Aux championnats d’Europe, il plana sur le 200 m, signant la victoire la plus nette enregistrée dans le seul domaine des courses, avec celle du relais 4 x 100 m français. Le jury ne s’est pas trompé !
PAB
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