Pour cette saison 1969, les athlètes suisses ont eu la belle surprise de voir dans leur programme les championnats d’Europe. Disputée tous les quatre ans, cette compétition aurait normalement dû se dérouler en 1970. Cependant les instances de l’athlétisme européen ont décidé de modifier leur planning traditionnel en agendant cette compétition à la fin septembre 1969 à Athènes. Cette nouvelle perspective va galvaniser bon nombre d’athlètes suisses, dont bien évidemment Philippe Clerc. Mais avant de penser à ces championnats continentaux, il faut passer par tout un lot de compétitions. Dans le cas du Lausannois, c’est forcément une bonne situation, dans le but surtout de retrouver des repères quelque peu égarés l’an dernier. Un fois réacquis, la confiance aidant, tout devrait revenir à la normale pour le Stadiste, c’est-à-dire de le retrouver tout proche des sommets de la hiérarchie du sprint européen.
Hansruedi Wiedmer en sparring-partner
La première compétition internationale de l’année se déroule les 8 et 9 mars à Belgrade à l’occasion des quatrièmes Jeux Européens en salle. Toujours en période foncière dans son entraînement hivernal, Philippe Clerc s’est volontiers prêté ce test sans grande importance pour lui. Lors de sa première course sur 50 m, il y a eu un faux-départ, mais les concurrents ne sont rappelés que tardivement par le starter. Dans la deuxième course, toujours essoufflé, Clerc rate sa mise en action et, sur une distance aussi courte, il ne peut revenir sur ses adversaires. Il se classe cinquième de cette course en 6″1 et doit en rester là. Pour se rattraper, l’étudiant en médecine décide de s’aligner sur 400 m. Il attaque sa série comme s’il s’agissait d’un sprint; il abandonne après 300 mètres, alors qu’il se trouve pourtant sur la même ligne que le Soviétique Yuriy Zorine (qui terminera troisième de la finale en 47″4). Dès son retour en Suisse, il reprend le cours de sa préparation, avec de surcroît un nouvel allié de premier choix : Hansruedi Wiedmer ! En effet l’actuel recordman suisse du 100 m (10″2), en provenance de l’AS Pratteln, fera partie du Stade Lausanne au cours de cette saison. Il s’agit certainement là d’une aide bienvenue pour Philippe.
La saison sur piste s’ouvre par un intéressant meeting le 20 avril à Milan. Sur 100 m, Clerc se classe deuxième de la finale en 10″8, battu par l’Italien Ennio Preatoni. Le Lausannois confie après sa course que le froid l’a empêché de se relâcher complètement, mais il se sent sur la bonne voie pour réussir une saison convenable. Clerc ne doit attendre qu’une semaine pour matérialiser ce sentiment. Le 26 avril au stade Olympique de la Pontaise à Lausanne, il s’impose sur 100 m en 10″6 et sur 300 m en 34″2, tout en donnant une impression de puissance et de rythme. Le même jour mais à Aarau, Hansruedi Wiedmer démontre qu’il sera lui aussi très fort cette saison en faisant nettement mieux que son nouveau compère sur 300 m en 33″4.
Le 24 mai lors du Disque d’Or à Vidy, Philippe Clerc s’illustre par une performance impressionnante de puissance sur 100 m. Les trois chronométreurs chargés de sanctionner sa performance enregistrent chacun 10″3. Il réalise ainsi pour la quatrième fois de sa carrière ce chrono, mais cette fois-ci sur la cendrée et non sur le tartan rapide du Letzigrund. La portée n’en est que plus importante. Juste derrière cet enthousiasmant chrono, il faut associer également les excellents 10″4 de Hansruedi Wiedmer. Sa lutte constante qui va l’opposer à Clerc tout au long de la saison pourrait bien l’amener à jouer les premiers rôles aux championnats d’Europe. Et ce n’est pas le verdict du 200 m qui clôt le Disque d’Or qui viendra démentir ces propos, puisque Clerc remporte cette course en 21″2 et Wiedmer a pu suivre le rythme en 21″3. Ainsi Philippe Clerc a pu quitter le stade avec le petit tricot qu’il a rapporté d’Italie et sur lequel il est noté : « Veni, vidi, vici »…
Philippe Clerc met les gaz lors des CSI à Zurich
Après dix jours passés à soigner une légère élongation à la cuisse survenue lors d’un meeting à Sion, Philippe Clerc retrouve le stade du Letzigrund pour la première rencontre du championnat suisse interclub de catégorie A qui oppose le 8 juin à Zurich les équipes suivantes : LC Zürich, BTV Aarau, TV Unterstrass et Stade Lausanne. Sa petite blessure n’est plus qu’un mauvais souvenir, mais il ressent encore les effets d’une bronchite. Malgré tout, il parvient à claquer deux chronos de niveau mondial. Le matin sur 100 m, après deux-faux départs, Clerc jaillit comme un diable de ses starting-blocks. Bien penché en avant, il profite au maximum des avantages du tartan. Il se détache progressivement de Wiedmer et il passe la ligne avec trois mètres d’avance. C’est allé très vite et le verdict des chronométreurs le confirme : 10″1, ce qui constitue la meilleure performance mondiale de l’année à égalité avec le prestigieux Américain John Carlos ! Malheureusement un vent mesuré à 3,7 m/s dans le dos interdit toute homologation de ce fabuleux chrono. L’après-midi, Philippe Clerc frappe un nouveau grand coup, mais sur 200 m cette fois-ci. En réalisant une ligne droite absolument prodigieuse, le Lausannois est chronométré en 20″6 (+1,5 m/s). Le record national qu’il détenait avec Peter Laeng est battu d’un dixième, ce qui lui permet de signer également la meilleure performance européenne de l’année et surtout de décrocher son ticket pour Athènes. Dans cette merveilleuse course, Hansruedi Wiedmer obtient un brillant 20″9 synonyme de limite européenne. Un résultat de grande valeur, même si pour le coup il est quelque peu relégué dans l’ombre par la prestation stupéfiante de Clerc.
Alors que son programme de compétition s’annonce fort copieux ces prochaines semaines, Philippe tombe malade et doit réduire passablement l’intensité de ses entraînements. Le 10 juin au stade John F. Kennedy de Dublin, les Suisses rencontrent pour la première fois l’Eire en match d’athlétisme officiel. Clerc et Wiedmer courent tous les deux le 100 m en 10″5. Sur le chemin du retour, le Vaudois obtient une place lors du Mémorial Méricamp organisé le 12 juin à Paris. Au stade Charléty, Philippe Clerc se met en évidence en remportant le 200 m en 20″7.
Les championnats suisses de relais, organisés le 15 juin par la GG Bern au stade du Neufeld, se courent dans d’excellentes conditions atmosphériques. Du côté romand, les espoirs de titre reposent essentiellement sur le 4 x 100 m du Stade Lausanne. Faciles vainqueurs en série en 41″8, puis en demi-finale en 42″3, l’équipe composée de Gérald Dambach, Philippe Clerc, Hansruedi Wiedmer et Dave James caracole en tête de la finale avec deux mètres d’avance au moment de l’ultime passage de témoin, moment précis où James doit se relever, victime de la classique blessure à l’ischio. Finalement, le BTV Aarau s’impose en 41″2 devant le LC Zürich en 41″3.
Une semaine plus tard, les athlètes suisses qui forment l’équipe nationale sont engagés le dimanche 22 juin dans un match qui les oppose à la France. La rencontre a lieu à Pulversheim, une ville d’Alsace située à dix bornes de Mulhouse et à une quarantaine de kilomètres de Bâle. Cette proximité a ainsi permis à quelques supporters helvétique de faire le déplacement. Philippe Clerc et Hansruedi Wiedmer sont battus d’un dixième sur 100 m en 10″6, mais le 200 m est bien plus intéressant avec Wiedmer qui se fait l’auteur d’un virage des plus remarquables qui le met hors de portée de tous ses rivaux. Sa ligne droite confirme qu’il est déterminé à gagner et il obtient une belle victoire en 21″3. Du coup, il a battu Clerc pour la première fois cette saison.
Le soleil brille de mille feux les 28 et 29 juin à l’occasion des championnats régionaux qui se disputent à Lausanne. Philippe Clerc, qui prépare d’arrache-pied le meeting international de Zurich, a pu en tirer des conclusions intéressantes au cours de cette compétition : il est sur la bonne voie au vu de ses 10″7 réussis en toute décontraction en finale du 100 m, tout comme les 21″8 obtenus en séries du 200 m, avant de renoncer à la finale, sûr d’être à nouveau en très bonne condition.
Philippe Clerc fait chavirer le Letzigrund avec un 200 m de feu
Vendredi 4 juillet, tous les yeux des observateurs – chevronnés ou amateurs – sont immanquablement focalisés sur le traditionnel meeting international de Zurich. La soirée s’annonce une fois de plus exceptionnelle avec la présence de nombreux athlètes étrangers, dont six champions olympiques. Le stade du Letzigrund est garni de dix mille personnes, toutes prêtes à s’enflammer pour la moindre performance. Et effectivement, elle a pu hurler son enthousiasme lors du 110 m haies quand l’Américain Willie Davenport a réussi à égaler le record du monde en 13″2. Décidément, le 110 m haies est bien devenu le monopole de la Suisse puisqu’à part celui de Earl McCullouch (États-Unis) le 16 juillet 1967 à Minneapolis, trois des quatre records du monde à 13″2 ont été réalisés dans notre pays : Martin Lauer (Allemagne de l’Ouest) le 7 juillet 1959 à Zurich, Lee Calhoun (États-Unis) le 21 août 1960 à Berne et maintenant Willie Davenport à Zurich. Il faut remarquer que les 13″2 de l’Allemand Lauer représentent le plus ancien des records du monde masculins. Ce qui est étonnant, c’est qu’il a réussi à survivre aux incroyables Jeux Olympiques de 1968 à Mexico.
Victime d’une baisse de régime quinze jours plus tôt lors du match France-Suisse à cause d’une maladie qui l’avait empêché de s’entraîner régulièrement, Philippe Clerc ne se laisse pas abattre car il a pu préparer avec détermination ce meeting de Zurich. Arrivé le soir précédent, l’étudiant en médecine doit constater, non sans une certaine surprise, qu’il ne fait pas partie de la série internationale du 200 m, lui qui est pourtant détenteur de la meilleure performance européenne de la saison sur cette distance. L’affaire s’est heureusement arrangée, mais Clerc, pas très content, est bien décidé à démontrer sur la piste qu’on avait tout de même traité son cas avec bien de légèreté. Sur 100 m, les organisateurs l’ont placé dans la série la plus relevée. Son départ est assez lent, mais il est suffisant pour distancer le hurdler Willie Davenport après trente mètres déjà. À partir des cinquante mètres, où il atteint une grande vitesse, Philippe Clerc sent sur sa droite trois autres adversaires et pas des moindres : le Cubain Hermes Ramirez, le Trinitéen Edwin Roberts et l’Allemand Gehrard Wucherer. Les sprinters d’Amérique Centrale passent en tête aux huitante mètres et foncent vers le fil d’arrivée à grande allure. Auteur d’un effort remarquable pour les suivre, Philippe Clerc échoue à moins de deux mètres de la victoire. Immédiatement on devine la traditionnelle agitation dans la zone de chronométrage. Après quelques instants, le speaker annonce qu’un des chronos a indiqué 9″9 et que deux autres se sont bloqués à 10″0 pour le vainqueur. Le Lausannois sait qu’il n’a jamais couru aussi vite et il suppose qu’un exploit est dans l’air. Le verdict des chronométreurs confirme cette impression : Hermes Ramirez améliore la meilleure performance mondiale de la saison avec 10″0, Edwin Roberts bat son record national avec 10″1, Philippe Clerc est crédité d’un 10″2 qui lui permet d’égaler le record suisse de son ami Hansruedi Wiedmer en 10″2, tandis que Gehrard Wucherer réussit 10″3 et Willie Davenport 10″4. Après sa magnifique performance sur 100 m, il devient désormais évident que des perspectives plus qu’intéressantes s’ouvrent au Vaudois sur 200 m, d’autant plus que les conditions sont plus que parfaites au Letzigrund. Philippe Clerc, qui reste l’homme des grandes occasions, va littéralement exploser dans sa course. Son départ est terrible, à tel point qu’il donne l’impression d’être seul en course dans le virage. Il accède à la ligne droite avec une avance de deux mètres au moins et il résiste merveilleusement au retour d’Edwin Roberts, qui lui aussi est à l’extrême limite. Devant la tribune principale où le monde s’est levé comme un seul homme, le sprinter du Stade Lausanne tient bon et s’impose brillamment sous une ovation incroyable de la foule, qui scande immédiatement son nom ! Pour connaître l’émotion ultime, il faut ensuite attendre un bon quart d’heure avant la sortie les résultats officiels, preuve que quelque chose de grand vient de se produire. Les chronométreurs et les juges arbitres sont enfin tombés d’accord et annoncent un temps absolument stupéfiant. En courant en 20″3 (20″50 électrique) avec un vent favorable (+0,4 m/s), Philippe Clerc a battu d’un dixième de seconde le record d’Europe du 200 m qui appartenait à quatre athlètes : l’Italien Sergio Ottolina en 1964, le Polonais Jan Werner et le Français Roger Bambuck en 1967 et l’Allemand Jochen Eigenherr en 1968. Ce record projette Clerc au sommet de l’élite européenne du sprint, ce qui est de très bon augure en vue des championnats d’Europe qui se dérouleront dans deux mois et demi à Athènes. En attendant cette échéance, le Lausannois sait qu’il a écrit ce soir au Letzigrund la plus belle page de sa carrière. Ce qui est à peine croyable, c’est qu’il a couru plus vite que Roger Bambuck, qui était pourtant imbattable en Europe l’an dernier et qui termina cinquième aux Jeux Olympiques à Mexico, tant sur 100 m que sur 200 m. Cela se passe de commentaires. Du coup on se rappelle de ce quinquagénaire zurichois totalement inconnu qui l’avait interpelé en août dernier dans ce même stade, alors que Philippe Clerc était en train de voir son rêve olympique lui filer entre les mains; les mots gentiment prononcé ce jour-là prennent tout leur sens aujourd’hui : «Monsieur Clerc, je voulais juste vous dire quelque chose. Je vous ai bien observé durant votre 200 m. Vous avez tout pour réussir 20″5 sur cette distance l’année prochaine… Bonne chance !». Quant à ceux qui ne cessèrent de douter de lui en 1968, ils ont applaudi comme tout le monde ce nouveau record d’Europe de grande valeur. En parlant de valeur, mais sur le plan financier, on ne peut s’empêcher de relater que le Lausannois a reçu un chèque de cent francs à valoir dans un magasin de Zurich, sur la chic Bahnhofstrasse. Comme il n’y avait aucun article moins cher, il a dû rajouter cinquante francs supplémentaires de sa poche…
Cette soirée du 4 juillet 1969, on ne l’oubliera évidemment pas de sitôt. Certes il y a avait bien eu l’édition de 1962, celle qui avait vu la jeune pépite Peter Laeng (LC Zürich) claquer son fameux 45″7 sur 400 m, meilleure performance mondiale de l’année. On disait de lui qu’il était l’athlète le plus doué de l’athlétisme suisse. Sept ans plus tard, toujours au Letzigrund mais sur le tartan, on est passé à un palier supérieur avec un autre sprinter, encore plus doué. Un record d’Europe pour l’athlétisme suisse, on n’avait plus vu ça depuis longtemps. C’était en 1924 aux Jeux Olympiques de Paris où Joseph Imbach (CA Genève) avait couru en séries le 400 m en 48″0. Sa performance avait même eu à l’époque la valeur d’un record du monde, qui ne dura certes pas plus d’un seul jour ! Philippe Clerc, quarante-cinq ans après Imbach, s’introduit lui aussi dans le panthéon de l’athlétisme mondial. Total respect !
Le 5 juillet, au lendemain de la nuit magique de Zurich, se déroule la deuxième manche du Disque d’Or à Vidy. Évidemment tout le monde n’a d’yeux que pour le nouveau recordman d’Europe du 200 m. Philippe Clerc, qui aspirait au repos, se décide tout de même à prendre le départ au 100 m afin de ne pas décevoir ses fans lausannois. En 10″7, il termine comme à Zurich à deux dixièmes du Cubain Ramirez. Avec la fatigue de la veille et la relative lenteur de la piste de Vidy, les deux sprinters ont simplement mis une demi-seconde de plus que sur le tartan du Letzigrund.
L’équipe nationale masculine se déplace les 19 et 20 juillet à Madrid pour sa troisième rencontre internationale. Après un match contre l’Eire à deux athlètes par spécialité, gagné d’avance et bien gagné dans la réalité, puis un match contre la France à trois athlètes par spécialité, perdu d’avance, mais perdu avec moins d’écart que prévu, voici maintenant le match des Six Nations appelé « Westathletic » au stade Villahermosa de Madrid, sur une piste et des installations en matière synthétique. On devrait plutôt dire match des Six « petites » Nations, puisque dans cette rencontre regroupe, outre notre pays, l’Espagne, la Belgique, le Danemark, l’Autriche et les Pays-Bas; la France et l’Allemagne ne sont pas représentées. Six petites nations, cela signifie qu’il n’y aura pas d’écrasement, mais un affrontement certainement âpre. Ce match aurait dû avoir lieu à Barcelone, cependant il été transféré à Madrid parce que le stade de la ville catalane n’est pas encore achevé. Sur 100 m, Philippe Clerc remporte la course dans un bon 10″4, mais moins facilement que prévu. Après un départ qui le porte d’emblée en tête, on le voit se crisper et c’est d’extrême justesse qu’il bat l’Autrichien Nedraunik. Il faut dire que l’estomac de Clerc, comme ceux de quelques-uns de ses coéquipiers, n’avait semble-t-il pas apprécié à sa juste valeur le petit buffet froid offert le matin par l’ambassadeur de la Suisse à Madrid… Le lendemain, Philippe Clerc joue son rôle de locomotive sur 200 m en dominant très largement la course en 20″8 au chronométrage électrique, malgré un départ relativement moyen et l’absence totale de concurrence dans la dernière ligne droite. C’est un excellent test à dix jours du match Europe vs USA de Stuttgart où l’étudiant lausannois disputera le 200 m contre notamment l’Américain John Carlos. La fête qui suit ce match à Madrid se termine au petit matin par un événement marquant pour l’humanité : les premiers pas de Neil Armstrong sur la lune, que Philippe Clerc et ses potes de l’équipe nationale voient admiratifs, en pleine rue, sur un poste TV encore allumé dans la vitrine d’un magasin.
À son retour en Suisse, le Lausannois apprend le 26 juillet que le jeune Reto Diezi a réalisé l’exploit d’égaler à Zurich le record suisse du 100 m, celui qu’il co-détenait avec Hansruedi Wiedmer en 10″2. Il s’agit là d’une véritable sensation car le junior du LCZ n’en était pour l’instant qu’à 10″5, un chrono réussi lors du meeting international de Zurich, ainsi que lors des championnats régionaux (mais avec +4,4 m/s).
Une sélection dans l’équipe d’Europe face aux USA à Stuttgart
En cette fin du mois de juillet, les États-Unis entrent dans une période où ils affrontent de très gros adversaires. À Los Angeles, il remportent une double victoire face à l’URSS et au Commonwealth. Les Américains ont facilement confirmé leur supériorité en remportant par 125 points à 110 leur rencontre contre l’Union Soviétique et par 137 points à 95 celle les opposant à la sélection du Commonwealth. Le fait de voir l’équipe soviétique se déplacer à Los Angeles est une véritable sensation, ce qui permet de mettre entre parenthèse la guerre froide qui sévit entre les deux pays. Malheureusement, et comme lors de la première édition en 1967 à Montréal, les athlètes de l’URSS continuent de bouder la sélection européenne qui affronte donc pour la seconde fois les États-Unis les 30 et 31 juillet à Stuttgart. Avec également le forfait de Lynn Davies, le champion olympique 1964 du saut en longueur, l’équipe d’Europe ne comprend ainsi aucun Britannique. Au Neckar Stadion, où pas moins de 35’000 spectateurs se sont déplacés, les États-Unis présentent une fort belle équipe, bien que la plupart des vedettes des Jeux Olympiques de Mexico sont soit absentes, soit en très mauvaise forme (à Los Angeles, Bob Beamon et Dick Fosbury sont battus à plates coutures avec des performances médiocres à 7,66 m et à 2,05 m). Un Suisse est sélectionné pour ce match prestigieux : Philippe Clerc sur 200 m, alors que Meta Antenen n’est que remplaçante sur 100 m haies. Le Lausannois doit affronter l’un des rares héros de Mexico actuellement en bonne condition, John Carlos, le médaillé de bronze du 200 m. Dans cette course, la supériorité des sprinters américains, déjà vainqueurs du 100 m et du 4 x 100 m la veille, ne sera pas à prouver. En fait, Philippe Clerc est le seul Européen qui peut prétendre s’élever au niveau de Carlos. En effet le recordman d’Europe réalise un virage où il ne concède que fort peu de terrain face aux Américains. Pourtant en début de ligne droite, il se désunit et se crispe brusquement, perdant ainsi en efficacité. Il ne parvient pas à retrouver la bonne cadence, mais arrache tout de même la troisième place. Le verdict du chrono électrique : 20″4 pour John Carlos, 20″6 pour Ben Vaughn, 20″7 pour Philippe Clerc et 20″8 pour l’Allemand Jochen Eigenherr. Le sprinter du Stade Lausanne, bien que battu, n’en a pas moins réalisé une performance chronométrique satisfaisante car 20″7 à l’électrique, cela correspond au plus mal à un 20″6, voire à un 20″5 pris manuellement. Dans une course qui représentera à coup sûr l’un des faits marquants de sa carrière, Clerc a prouvé que ses 20″3 de Zurich n’étaient pas dus à la chance. Il est bien actuellement le meilleur européen sur 200 m et il s’agit maintenant pour lui de préparer les championnats d’Europe d’Athènes avec tout le sérieux qu’il a manifesté, tant avant le meeting de Zurich qu’avant ce match de Stuttgart. Au classement de cette compétition, la victoire des Européens est nette et plus élevée qu’on le ne pensait : 113 points à 97.
PAB
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