Bohren : « Dans la course, je me suis dit que c’était déjà bien d’être en finale »
Ça ne fait à priori aucun doute, comme l’a écrit Swiss Athletics dans son article après la course : Maël Bohren a réussi son premier grand rendez-vous international la semaine dernière en Suède. Avec le 20e chrono des 21 engagés, il a créé l’exploit de se ménager une place en finale des 12 meilleurs. Avant d’y être méconnaissable et de terminer… 12e et beau dernier de celle-ci. En se penchant de plus près sur la performance de Bohren, il s’avère que le junior valdo-valaisan a connu un gros passage à vide au moment d’aborder la course la plus importante de sa jeune carrière : il a cédé dès la mi-parcours, pour terminer en perdition loin derrière tout le monde, en 4’03, à quelque 15 secondes de son record. Un peu comme en finale des Championnats suisses de l’an passé à Frauenfeld… Sans encore se remettre en question, il raconte sa tactique, parle de la tête, des jambes et invoque le mystère :
Bohren : J’ai abordé la course avec une tactique bien précise en tête. C’était de me placer aux avant-postes pour éviter les bousculades dans le peloton. Puis de suivre le plus longtemps possible, comme en séries. Mais je n’ai jamais réussi à me mettre dans la finale. A l’échauffement, ça allait bien, j’avais de super jambes : j’étais prêt à me battre. Et puis, dans la course, je suis parti vite, comme prévu, pour jouer ma carte au mieux. Je fais une première erreur après 600 m, en laissant un petit écart avec l’Anglais devant moi. Deux-trois adversaires s’y sont alors placés. Puis, à 800 m, je me retrouve derrière, je ne réagis pas assez vite et me retrouve à deux-trois mètres, avec du vent de face. Si j’avais vraiment été super bien, j’aurais peut-être pu recoller, mais là c’était impossible. Ensuite j‘ai complétement lâché dans la tête.
ATHLE.ch : En dehors des petites erreurs tactiques, comment se fait-il que tu aies été si loin de ton meilleur niveau ? Que tu aies comme ça passé par la fenêtre ?
Bohren : Je ne sais pas. Je pense que c’était plutôt dans la tête que dans les jambes. Mais c’est clair que ça m’a mis une claque de souffrir comme ça sur un rythme de 2’08 au 800 m… C’est vraiment un mystère. Avec l’adrénaline, je suis peut-être parti trop fort sur les 100 premiers mètres. C’est possible que je l’aie payé ensuite. Mais je pense plutôt que j’aurais dû relâcher plus tard mon effort, après 300 m. Parce que là, de couper après 100 m, ça m’a rendu un peu passif, inactif pour le reste de la course.
Je crois qu’émotionnellement c’était tellement fort de passer en finale jeudi, que je n’ai pas bien réussi à me remettre dedans. C’était vraiment l’exploit, un peu comme un rêve qui se réalisait. Peut-être bien qu’à un moment, dans la course, je me suis dit que c’était déjà bien d’être en finale.
ATHLE.ch : Qu’est-ce-que tu pourrais faire différemment pour une prochaine fois ?
Bohren : Je ne sais pas. La préparation, je l’ai faite comme il fallait. A l’échauffement, j’étais bien dedans. Je ne sais pas trop comment je pourrais faire différemment une prochaine fois. Je regarderai plus tard la course encore une fois. Pour l’instant je n’ai pas trop envie.
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Wanders : « Le plan, c’était d’augmenter le rythme à chaque tour dès les 2000 m »
Sur le papier, Julien Wanders était l’homme à battre sur le 5000 m de ces championnats d’Europe juniors. Avec son record national U20 et meilleure performance européenne juniors de la saison de 13’48, le Genevois faisait peur à tout le monde et partait au minimum pour décrocher une médaille. Plus encore : seul le titre aurait totalement pu satisfaire les grosses ambitions du jeune coureur. Mais tout ne s’est pas déroulé comme espéré, déjà à l’approche de la compétition. Partis en camp d’entraînement durant deux semaines dans le Centre thermal de Bad Dürrheim, au sud de l’Allemagne, Wanders et ses deux collègues d’entraînement Joaquim Jaeger et Simon Porras, qui avaient tous trois créés la sensation en début de saison et brillamment obtenu leur billet pour ces Europe U20, en sont rentrés… malades. Avant de passer complétement à côté de leurs championnats. Wanders raconte, non sans savoir déjà comment corriger le tir pour la prochaine fois.
Wanders : On est tous tombés malades en stage. C’est Simon [Porras] qui a le premier attrapé froid : un gros rhume avec mal de gorge et tout. Et puis, il l’a passé à Ilias [Hernandez – autre membre du groupe des Genevois] et à moi ; et c’est finalement Jojo [Joaquim Jaeger] qui l’a eu en dernier. Ilias a vraiment été mal et il n’est encore pas très bien maintenant, aussi parce qu’il a continué à s’entraîner. Moi, j’ai arrêté un jour avant de reprendre, mais j’avais vraiment un gros rhume. Je crois que j’ai jamais eu un aussi gros rhume.
La semaine des championnats il y a eu un ou deux entraînements pas terribles, mais ça ne m’a pas trop inquiété. Au départ de la course, je pensais que ça allait aller. Comme à chaque fois, j’arrive à me convaincre que je suis bien, parce que ça ne sert à rien de paniquer. Dans la course, j’ai appliqué mon plan : j’ai attendu deux kilomètres, puis suis passé devant. J’ai alors comme prévu fait un tour en 68″, et là, j’ai tout de suite senti que ça n’allait pas le faire. Le plan, c’était d’augmenter alors le rythme à chaque tour, mais j’avais les jambes complètement vides. Evidemment, quand je n’ai pas réussi à suivre le premier groupe ça m’a mis un gros coup au moral.
ATHLE.ch : Qu’est-ce-que tu pourrais faire différemment pour une prochaine fois ?
Wanders : On en a tiré comme conclusion, avec le coach [Marco Jaeger], que ce n’était peut-être pas une bonne idée de partir en stage et de vivre en groupe juste avant une compétition importante…
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Une des grandes difficultés, dans notre sport comme ailleurs, est d’être à son meilleur niveau le jour J. Dans le corps certes, mais aussi dans la tête. Qu’importe que ce soit pour sa course préférée, dans la région, en championnat cantonal, régional ou national, ou encore en grand rendez-vous international, pour les plus chanceux.
Comme le dit bien Swiss Athletics, les grandes compétitions internationales jeunesse sont là pour permettre à nos jeunes athlètes d’apprendre. D’apprendre pour, si possible, atteindre le meilleur niveau. Pour autant qu’on ne se cache pas derrière des boîtes d’allumettes, tire les bons enseignements de ses erreurs et ait les moyens de ses ambitions. Dans le corps certes, mais aussi dans la tête.
Mujinga Kambundji, Kariem Hussein et autres Selina Büchel en sont nos meilleurs exemples actuels.
Lien vers notre résumé complet des Championnats d’Europe U20 en Suède