Berlin 2018 | Les commentaires qu’on n’a pas eu le temps de faire IMPRESSIONS | La semaine passée, à Berlin, la petite équipe d’ATHLE.ch a non seulement vibré à fond avec les athlètes, mais aussi tout donné pour vous proposer toutes sortes de contenus : présentations, vidéos, photos, résumés, interviews et commentaires. A l’ouvrage quasi jour et nuit – dans la tribune de presse du Stade olympique, chez le Turc du coin encore ouvert à deux heures du matin en passant par l’hôtel des athlètes et la place des cérémonies protocolaires –, nous n’avons pas eu l’occasion de vous raconter tout ce qu’on aurait aimé. Petite séance de rattrapage avec un commentaire supplémentaire par jour de compétition.

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Jour Q | Cruels championnats

Derrière les quelques stars de la délégation suisse qui ont eu l’occasion de jubiler ou d’étaler leur déception en public, l’immense majorité des 53 Helvètes du voyage à Berlin a fait l’expérience de la grande cruauté d’un championnat international : de longs mois de préparation, l’excitation du voyage, plusieurs jours de tension et de préparation à l’hôtel, le stade et la mise en scène grandioses, la peur, l’envie, un coup de feu, trois sauts, trois lancers et BING, en un instant tout est déjà fini. Grosse claque, retour au travail, loin des feux de la rampe, sans plus personne pour vous chouchouter, avec le lointain espoir de revivre un jour cette intensité, de faire mieux la prochaine fois.

Jour 1 | Trop long le 10’000 m ?
Pour garder le public en haleine, les dirigeants de l’athlétisme européen et mondial ont une idée fixe : ne laisser aucun temps mort, densifier le programme, réduire les durées, proposer sur le web courses et concours à la carte. En Diamond League, les compétitions du meilleur niveau mondial s’enchaînent à un rythme effréné. En championnats d’Europe, le rythme est également soutenu : une série chaque 7 minutes, des médaillés stoppés dans leur tour d’honneur pour laisser la place à la présentation de la finale suivante, 10 secondes de course et il faut déjà oublier l’athlète qu’on a adoré pour admirer ceux qui entrent à l’instant dans l’arène. Si tout va bien, on se souvient encore du résultat final en fin de soirée, mais le lendemain, on a toutes les chances de l’avoir zappé. Et puis, soudain : la finale du 10’000 m, 25 tours de piste, 28 minutes en compagnie des mêmes coureurs, qui souffrent, lâchent, reviennent, se replacent, coincent, attaquent. « Beaucoup trop long », de l’avis de nos voisins en tribune de presse ; « enfin le temps de vivre quelque chose avec les athlètes » de notre point de vue.

Le même soir que le 10’000 m avaient lieu les demi-finales et les finales du 100 m : l’occasion de voir une première fois les athlètes en début de programme, de faire son pronostic, d’avoir l’une ou l’autre préférence, de se réjouir, avant de vivre avec une intensité incomparable les finales en fin de session. Et si pour rendre ce sport encore plus attractif la solution était de ralentir et non d’accélérer ? De laisser le temps de raconter et de se raconter des histoires ? Pour nous, vivre à fond le grand moment de la saison de deux de nos chouchous (Julien Wanders et Mujinga Kambundji) a largement suffi à rendre la soirée passionnante.

Jour 2 | Athlètes et journalistes vs la zone mixte

La « zone mixte » est le lieu de rencontre entre les athlètes et les journalistes juste après la compétition. Seul contact officiel vers l’extérieur pour les premiers, seule opportunité de recueillir des impressions pour les seconds. Si à priori chacun bénéficie de cette rencontre, l’exercice peut s’avérer long et pénible des deux côtés. A Berlin, au vu de l’attrait médiatique des championnats, la zone mixte était interminable, pour les athlètes comme pour les journalistes. Avec une double hiérarchie : financière et traditionnelle. Une première zone sur le stade réservée aux télévisions ayant acheté les droits de retransmission et payé (cher) la location d’un box d’interview, une deuxième dans les travées pour les détenteurs de droits restant, une troisième pour la presse écrite, où à la toute fin les médias digitaux ont le droit, sous certaines conditions exceptionnelles, d’interviewer l’athlète en vidéo. Résultat : un très long parcours pour l’athlète qui aimerait au lieu de répéter 20 fois la même chose : rentrer récupérer en vue du tour suivant, retrouver et embrasser ses proches, aller vomir dans une poubelle, s’asseoir par terre et pleurer, etc. Une longue attente et un stress pour le journaliste qui aimerait entendre l’athlète à chaud au lieu de devoir rester jusqu’à une heure debout à piaffer d’impatience enfermé dans sa zone mixte sans plus voir ce qu’il se passe sur le stade et avant de grimper les quelque 1000 marches qui le séparent de sa place et son ordinateur dans les tribunes.

Si certains athlètes ont plus souffert en zone-mixte que sur la piste, on a de notre côté aussi froncé les sourcils à plusieurs reprises : parce que les athlètes suisses qui devaient répondre à deux télévisions ET radios nationales – en plus des éventuelles demandes internationales pour les meilleurs – étaient quasi-systématiquement les derniers à sortir du stade, parfois plus d’une heure après avoir franchi la ligne ; parce que les médias digitaux que nous sommes avons été relégués après la presse écrite – pourtant heureuse de nous voir amorcer la discussion avec les athlètes – ; parce qu’on s’est fait réprimander au même titre que les officiels de l’équipe suisse pour avoir fait perdre une poignée de secondes à notre chère RTS en tapant sur l’épaule d’un athlète ou prenant une photo avant son entrée en zone mixte, etc. Des problèmes qui ne se posaient pas cet hiver aux Mondiaux en salle à Birmingham quand nous étions grosso modo le seul média helvétique à avoir fait le déplacement…

Jour 3 | Une médaille c’est quoi ?
Quelle finale sur 400 m haies masculin ! Poussé dans ses derniers retranchements par Yasmani Copello (TUR), le phénomène norvégien Karsten Warholm se surpasse dans la dernière ligne pour gagner en 47″64 : record d’Europe U23. Derrière, ça va vite aussi pour Copello (47″81), Barr (IRL/48″31), Vaillant (FRA/48″42), Dobek (POL/48″49) et Mägi (EST/48″59). On ne peut s’empêcher de se demander ce qu’aurait pu faire là au milieu notre Kariem Hussein, blessé cet été, qui a gagné il y a 4 ans à Zurich une médaille d’or qui a changé sa carrière et sa vie en… 48″96 et dont le record est de 48″45. Autre exemple : Mujinga Kambundji, qui est repartie brisée de Berlin après trois 4e places sur 100 m (11″05), 200 m (22″45) et 4×100 m (42″30). Des chronos qui lui auraient valu l’or (100 m) et deux fois l’argent à Zurich, ou encore 3x l’argent il y a 2 ans à Amsterdam. Et on ne parle même pas du Polonais Lisek, 4e d’un concours de perche de folie avec un nouveau record à 5,90 m. Pour gagner une médaille il faut deux choses : être prêt au bon moment et que ses adversaires ne le soient pas trop.

Jour 4 | Mondiaux U20 vs Championnats d’Europe
Deux phénoménaux juniors ont illuminé les Europe de Berlin 2018 : Armand Duplantis (SWE) avec un hallucinant bond à 6,05 m (avec de la marge) à la perche et Jakob Ingebrigsten (NOR/17 ans) auteur d’un incroyable doublé 1500 m/5000 m (en patron). Si Duplantis s’était imposé en début d’été aux Mondiaux U20, ce n’est pas le cas d’Ingebrigsten, battu à la régulière par de jeunes Africains et devant se contenter de l’argent et du bronze. Pourtant, même si quelques disciplines de course font exception, le niveau général des Europe de Berlin était bien plus élevé que celui des Mondiaux U20. Notre double médaillée juniors Delia Sclabas, sèchement sortie en séries du 1500 m, ne dira pas le contraire.

Jour 5 | Les pieds sur terre
Lea Sprunger au paradis : cérémonie protocolaire en grandes pompes, sur la plus haute marche du podium, médaille d’or, hymne national, drapeaux suisses, larmes à l’œil, toute la famille réunie. L’instant si souvent espéré. Derrière la scène, deux journalistes qui attendent – un Romand et un Suisse-allemand – bien décidés à saisir l’opportunité : Lea qui plane, heureuse et détendue comme jamais, l’occasion idéale de lui poser toutes les questions, la faire entrer là où elle refuse habituellement d’aller, lui faire enfin dire ce qu’on aimerait lui faire dire : que le 400 m haies « c’est quand même la merde », que cette médaille « elle aurait dû la gagner il y a bien longtemps déjà », etc. Faux espoirs ! C’est très mal connaître la Ginginoise. Si elle s’était envolée quelques instants, la revoilà directement les deux pieds sur terre, le sourcil droit qui se lève, quelques plis sur le front, puis, d’un ton agacé : « D’autres questions ? »

Jour 6 | Médaillés pas fans de flonflons
Si Alex Wilson, Lea Sprunger, Tadesse Abraham et Fabienne Schlumpf sont des personnes trèèèèès différentes les unes des autres, ils ont un point commun : les flonflons et autres célébrations, ce n’est pas trop leur truc. Du bain de foule au Fan Event de Swiss Athletics, en passant par les mises en scènes des partenaires, jusqu’à l’accueil des fans à l’aéroport de Zurich, on l’a constaté en souriant… Mais chuuuuut ! Ce sont de vrais pros et ils font ça très bien.

Merci de nous avoir suivi toute la semaine durant et Auf Wiedersehen !

Lien vers notre dossier spécial Berlin 2018

 

 

 

 

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