Chronique | Le sport noyé sous les chiffres ? PENSÉE ATHLÉTIQUE | Les progrès techniques impliquent une prolifération d’informations statistiques. Dans l’interview du Bund du 5 février dernier, le désormais nonagénaire pionnier du journalisme sportif Karl Erb critique cette évolution. En réactionnaire ? En visionnaire ? ATHLE.ch revient sur quelques-uns de ses propos. Les « stats » empêchent-elles de voir l’essentiel ?

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En prenant pour exemple les courses de ski, Karl Erb se plaint du grouillement de chiffres, de temps intermédiaires, d’écarts, de vitesses et autres statistiques. Les reporters eux-mêmes sont submergés d’informations. Tellement qu’ils ne voient plus l’ensemble de ce qui se passe et sont incapables d’interpréter les phénomènes, les mouvements, les difficultés, les exploits, les échecs qui se jouent. Au point d’être amenés à commenter bêtement les « stats », et passer à côté de l’essentiel. Exemple de remarque journalistique lors d’une descente féminine de ski alpin : « Son retard est devenu plus grand, il faut qu’elle mette les gaz ! » Erb de se demander : « Mais bon Dieu : comment une skieuse peut-elle mettre les gaz ? »

COMMENTAIRE : en ne se concentrant que sur les chiffres, les faits objectifs, les journalistes et par suite les téléspectateurs ont tendance à manquer l’essence même du sport : la quête, au meilleur niveau, de la bonne tension, du bon relâchement, du bon équilibre qui permet la fluidité, l’efficacité, le succès et la beauté des corps.

PERSPECTIVE : le seul intérêt statistique a pour conséquence une quête effrénée de chronos, de distances, de records. Au risque d’un abrutissement des animateurs, des (télé)spectateurs, des lecteurs et… finalement des sportifs eux-mêmes, sans parler de leur entourage.

Karl Erb | Un pionnier
Le connaisseur de sport et écrivain est né en 1926 à Belp. Suite à la deuxième guerre mondiale, il compte parmi les premiers journalistes sportifs à faire de leur passion leur profession. Dès 1953, il travaille comme chef de presse et speaker de manifestations sportives nationales et internationales (CM de foot 1954 à Berne, CE d’athlétisme 1954 à Berne, CM de ski 1974 à St-Moritz, etc). Entre 1961 et 1983, il commente le ski, la formule 1, l’athlétisme, l’équitation et le cyclisme à la TV. Il était membre du Comité olympique suisse et actif dans la Commission de sélection du Comité national du sport d’élite. Depuis 1993, Erb (aujourd’hui presque nonagénaire) vit au bord du Lac Majeur, d’où il suit le sport « avec grande attention et beaucoup de passion ».

Le sport : affaire d’argent et de puissance ? Relisez le premier épisode de notre série consacrée aux propos de Karl Erb ici.

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